Âme soeur

Vingt-cinq jours ont passé depuis que mon âme soeur est partie. Je chemine, mais chaque seconde est encore difficile. Si seulement mon coeur pouvait se déserrer un peu. J’ai lu dans le livre « Rebondir » que dans ces périodes de grande difficulté, il faut tout ramener à soi, même si l’idée semble égocentrique. Les premiers jours, je trouvais cette idée affolante. Mon « moi » était si éclaté, si souffrant, si seul et diminué que je ne voyais absolument pas comment je pourrais me tourner vers lui, encore moins m’y appuyer. Ce que je commence à entrevoir, par contre, c’est que les souvenirs, les espoirs que l’autre revienne, les regrets de ne pas avoir agi à temps et tout ce que le mental ramène sans arrêt, comme des vagues, empêche d’avancer.

Pendant 33 ans, j’ai eu un homme à la maison. C’était une sécurité, pour moi. Peu importe ce que je faisais, où j’allais ou avec qui, j’avais cette impression un peu monotone mais rassurante qu’il serait là à mon retour. Je me suis accomodée tant bien que mal – et très mal à certains moments – du train train, de la vie de famille, des frustrations et de toutes sortes de sentiments refoulés qui ont fini par s’exprimer chez moi par des malaises physiques assez débilitants: nausées constantes, migraines, troubles digestifs, etc. Ça a duré 15 ans. Mes enfants ont eu une mère qui se retirait souvent dans sa chambre et qui n’avait pas de patience. Pas beaucoup d’écoute non plus.

Avec un peu de recul, je commence à entrevoir et surtout à ressentir comme il est impossible de donner profondément quand on est soi-même en manque affectif. Je me suis attachée à cet homme comme à une bouée de sauvetage, et lui a sans doute fait un peu la même chose, pour ses propres raisons, ses propres manques, ses propres douleurs d’enfant jamais guéries. Il y a eu des crises et des crises et tout autant de rapprochements, des tentatives de thérapie de couple qui n’ont pas été fructueuses parce que nous n’avons pas plongé en profondeur. C’était sans doute pour nous trop effrayant.

Ma vie n’était tout de même pas un désastre. Côté amis et travail, c’était bien. J’ai beau souffrir à en crever maintenant, je sais qu’en temps normal, je ressens une assez belle joie de vivre. C’est en-dedans, dans la zone qui touche l’intimité, qu’il y a une blessure énorme. Je ne sais pas si c’est la peur d’y faire face qui m’empêche de remonter jusqu’à elle, de l’identifier. En tout cas, je n’y arrive pas, et ça me décourage. Je veux guérir. J’ai eu l’impression ce matin que de parler à coeur ouvert à l’intérieur d’un groupe pourrait être libérateur. Comme si, entourée d’autres personnes qui souffrent, j’arriverais à toucher à ma tristesse profonde. J’ai besoin d’exprimer cette immense douleur qui m’habite.
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